C'est l'histoire d'un couple qui, arrivé dans la quarantaine, s'organise pour partir un an, en congé sabbatique, sac au dos, en Asie.
Petit détail : ceci s'est passé en 92-93 !
Après relecture de Routards & Cie, que Sally avait rédigé à notre retour, nous avons décidé d'en faire un blog d'une durée d'un an en respectant le texte original et sa chronologie afin d'y retrouver les émotions de l'époque.
Les 675 photos, les 65 documents scannés, les 12 dessins, les 125 vidéos et les 95 enregistrements sonores sont d'époque aussi.
Bonne lecture !

Delhi, 30 août 1993

Pour terminer cette année en beauté nous nous offrons une petite folie.
A suivre...

"Librairie" de trottoir

Delhi, 28 août 1993

Seulement une nuit à Dharamsala, avant d’aller chercher le train à une centaine de kilomètres, au Penjab. Il fait tellement chaud que nous finissons par prendre une douche à la gare - ça existe presque dans toutes les gares.
C’est au petit matin que nous arrivons à Delhi, après un voyage en compagnie d’un papy de 91 ans, habillé à la Nehru, à moitié sourd, et très bavard.
Nous retrouvons une chambre au 55.

Connaught Place

Soldes d’été à Delhi, il y a un monde fou ce samedi sur Connaught Place. Ravi Shankar a été hospitalisé. Mère Teresa va mieux. Il fait toujours chaud ici.

Daramsala, 26 août 1993


Pas grand-chose d’intéressant, mis à part les paysages de la région de Dharamsala, et la route en lacets qui mène de Dharamsala à Mac Leod Ganj, siège du gouvernement tibétain. Le panorama est à couper le souffle.

Jogindernagar, 25 août 1993

L'objectif du jour : l’école tibétaine de Bir où vit Phurbu Dhondup, l’étudiant tibétain que nous parrainons.


Nous trouvons du premier coup ! Tout le monde est là, la secrétaire administrative avec laquelle je corresponds depuis plusieurs années, et qui a continué de nous écrire pendant notre périple, ainsi que Phurbu, 18 ans, tellement excité de nous rencontrer enfin, qu’il en perd son anglais.



Nous visitons tout, les dortoirs des filles et ceux des garçons, la boutique, la cuisine, l’économat. Les salles de classe sont fermées car la journée est consacrée aux travaux collectifs pour la construction d’un nouveau bâtiment.
Ils sont 450 étudiants, dont la plupart ont fui le Tibet par une filière népalaise. Là-bas, ils restent quelque temps dans des centres d’accueil, puis partent en car vers Delhi pour les formalités administratives indiennes. Ensuite, direction Dharamsala, capitale du gouvernement tibétain en exil, là où réside le dalaï-lama lorsqu’il n’est pas en World Tour ! Enfin, ils sont envoyés dans les divers camps de réfugiés du nord et du sud de l’Inde. Entre le Tibet et le Népal, le voyage se fait à pied : Phurbu a mis 18 jours dans la neige, laissant derrière lui toute sa famille.

Le gouvernement chinois considère l’école de Bir comme subversive. Aussi, ceux qui retournent au Tibet après avoir terminé leurs études, ont-ils droit à un comité d’accueil. Prison, interrogatoires... Nous déjeunons avec la secrétaire, puis Phurbu nous montre son album photos avec les portraits de ses parents et de ses meilleurs amis restés au Tibet. Les nôtres, envoyées au début du parrainage, il y trois ans, y figurent également.
Nous terminons l’après-midi avec une séance photos et vidéo sous les regards amusés de dizaines de garçons et de filles qui nous observent.

Jogindernagar, 24 août 1993

Circulez, y a rien à voir ! Pourquoi sommes-nous ici, alors ? 
Réponse demain...


Manali, 22 août 1993



Belle promenade dans le vieux Manali à un kilomètre du centre. Pour y arriver, nous prenons le chemin des écoliers à travers les champs de maïs et les pommeraies. Ah, les belles pommes rouges et croquantes ! C’est la pleine saison, et nous croisons sans cesse des hommes portant sur leur dos des paniers coniques pleins de fruits qu’ils vont porter aux négociants qui les expédient dans toute la région. Avez-vous déjà goûté du jus de pomme frais ? Un véritable délice !



Mais revenons au vieux village, étagé sur les pentes d’une colline : les murs sont en pierre et grosses traverses de bois, le toit plat est couvert d’immenses lauzes. Les femmes tissent au soleil devant la maison, les matelas et les couvertures s’aèrent au balcon. Tout est calme.


Rien à voir avec la ville nouvelle où nous logeons, caractérisée par son “anarchitecture”. Vue de haut, elle est laide, vue d’en bas, elle est sale et bruyante, mais l’ambiance y est encore authentique : de nombreuses échoppes préparent des mets frits dans de grands woks pleins d’huile, des Indiens en vacances, fiers de leur position sociale, se pavanent en famille avec leurs enfants, les Tibétains réfugiés vendent leurs produits dans leur propre marché, des guérisseurs rajasthanis que l’on repère de loin à leur turban viennent vendre ici leurs remèdes à base de plantes : d’après leur livre d’or, c’est la formule n° 15 qui semble rassembler les suffrages des utilisateurs. Grâce à elle, adieu aux aigreurs d’estomac, aux kilos en trop, et aux pannes sexuelles !

Manali, 21 août 1993

Guérisseurs du Rajasthan



Bien arrivés, hier soir, bien reposés ce matin. Et c’est tant mieux, car je ne le ferai pas tous les jours !

Je prends mon pied en regardant un film indien : une belle histoire d’amour presque impossible entre un homme et une femme. Ils savent rire, pleurer, chanter et courir au ralenti dans des prairies couvertes de fleurs sur fond de rivières et de montagnes. Les scènes d’amour s'arrêtent avant le baiser, dans leur version “hard”.


Le héros, qui répond rarement aux critères de beauté occidentaux, se reconnaît aux attributs suivants : veste cintrée, chemise à col largement ouvert laissant voir des poils virils sur la poitrine, cheveux un peu longs ou moumoute, si le jeune premier a dépassé 50 ans, dents ultra-blanches, et - très important - lunettes de soleil de type Ray-Ban. L’héroïne - je trouve les actrices indiennes très jolies - au maquillage très chargé, change de vêtements et de coiffure à chaque scène. Minijupe, sari, jeans, tout y passe !

[Chansons du film Aankhon Aankhon Mein]

À chaque film, ses ballets, ses chansons. Les acteurs, qui sont doublés par des chanteurs connus connaissent une adulation à peine imaginable de la part de millions d’hommes et peut-être de femmes.


Manali, 20 août 1993

Il nous reste 220 kilomètres pour atteindre Manali. Lever à 4h45, départ à 5h30, arrivée vers 18h45...






photo 1-1
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Nous quittons progressivement le paysage lunaire du Ladakh, nous abordons l’Himachal Pradesh et la verdoyante vallée de Kullu qui a connu le mois dernier les déferlements de la mousson : le niveau de la rivière Beas est monté de plus de dix mètres emportant dans ses flots des morceaux de route, des maisons, des arbres, des gens…


[Reportage durant le trajet en bus de Sarchu à Manali]


Cinq minutes après notre arrivée à Manali, nous nous installons dans un petit hôtel conseillé par un routard de notre car. En plein centre, dans une rue calme, nos fenêtres donnent sur - par ordre d’apparition - les pommiers, la cour de l’école, le maïs en terrasses, les chalets et les forêts de pins sur les collines en face.

Nous avons une salle de douche avec eau chaude, la moquette est neuve, les peintures viennent d’être refaites et la télévision marche quand il n’y a de coupure d’électricité. Bref, presque le luxe pour 125 roupies par jour.

Sarchu, 19 août 1993

Panneau indicateur à Upshi

Départ à 6h15. Le car est confortable, mais les 475 kilomètres (255 aujourd'hui et 220 demain) de route... La moitié n’est pas - ou plus - goudronnée, le bas-côté est bordé de grosses pierres qui ne demandent qu’à dévaler les pentes, les lacets sont tellement serrés - les fesses aussi - que les deux chauffeurs doivent souvent s’y reprendre à plusieurs fois ; croiser un autre car est une manœuvre au centimètre près ; on ne compte plus le nombre de rivières et de cascades passées à gué, ni les troupeaux de chèvres et de moutons se promenant sur la route et plus loin des marmottes dressées sur leur pattes arrière. Le bus fatigue, on est parfois obligé de descendre pour qu'il monte...


Heureusement, les paysages nous occupent pendant une grande partie de la journée ; ils sont très variés, puisque nous descendons de 5 400 mètres (col de Tanglang) à 1 800 mètres (Manali).



Juste un mot sur l’étape de nuit dans un camp de toile à près de 5 000 mètres d’altitude : une paillasse et deux grosses couvertures par personne sous de grandes tentes. Malgré les chaussettes ladakhies, achetées la veille, nos pieds restent gelés toute la nuit.

[Reportage durant le trajet en bus de Leh à Sarchu]

Leh, 18 août 1993

On ne se lasse pas de flâner dans les rue de Leh.









Déjeuner au Mona Lisa


Le bus de Manali est bien arrivé aujourd’hui ; c’est ce même bus qui nous y emmènera demain à Manali, en deux jours.
Pas de restaurant en route, aussi faisons-nous quelques achats : un beau pain bis de la German Bakery, du miel, du fromage à tartiner en conserve, des biscuits, et des œufs durs.
Nous allons prendre l’une des plus hautes routes du monde. Vous pensez tenir le coup ?

Leh, 17 août 1993






Toute la matinée, diffusion par hauts parleurs de prières et musique bouddhiques.

[Prières bouddhiques]

Leh, 16 août 1993


Et si je vous parlais un peu de nourriture ? Cela ressemble un peu à Katmandou : à la German Bakery, tenue par des sikhs, on déguste des pizzas ou du poulet rôti, chez Mona Lisa du tzatziki et du houmous, au Tibetan Corner des omelettes Fuyong (mais c’est chinois ça !), au Yak Tail des frites, etc.

Ne me demandez pas à quoi ressemble la cuisine locale, je n’en sais rien. Mais le point commun, c’est le yaourt frais qui nous permet de renouer avec les laitages. Beaucoup de vaches à Leh (ah ! ah !), même dans le jardin de notre guesthouse. Grâce à elles, nous avons du lait, du yaourt, du lassi, du beurre, et des bouses séchées qui servent de combustible.

Rubrique boissons : de l’eau minérale, du jus de pomme, de prune, d’abricot et toutes sortes de thés parfumés au citron, à la cannelle, au gingembre. Ici, il est conseillé de boire, sinon gare à la déshydratation !



Promenade à pied vers Sankar Gompa dans la banlieue de Leh.

Leh, 15 août 1993










Branle-bas de combat à Leh ! À l’occasion de la fête de l’Indépendance, un grand spectacle de danses et de musique doit se dérouler sur le terrain de polo. Toute la population de la ville et des environs se retrouve sur les gradins du stade. Nous les reconnaissons tous : les Ladakhis aux yeux bridés, les Penjabis au turban coloré, les Cachemiris moustachus. Tous différents, tous Indiens.










Qui peut résister à ce spectacle ? Pas l’index fou de Picard, en tout cas ! Je dois avouer que moi-même j’ai beaucoup joué du caméscope, tout y est passé, des bébés assoupis dans le dos de leur mère jusqu’aux soldats du service d’ordre avec leur béret kaki à plumet bleu.

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